11 mars 2024

La CFTC soutient la création d’un compte épargne-temps universel

Depuis mi-décembre, organisations syndicales et patronales mènent une négociation baptisée « pacte de la vie au travail », qui vise à favoriser, entre autres, les reconversions professionnelles, l’emploi des séniors et l’aménagement des fins de carrière.

Le compte épargne-temps universel (CETU) fait partie des grands thèmes débattus par les partenaires sociaux : ce dispositif doit permettre à tous les salariés de stocker les congés payés et les RTT qu’ils n’ont pas sollicités, pour pouvoir les utiliser ultérieurement. Favorable à son adoption, la CFTC défend un mode de fonctionnement équilibré du CETU, afin que sa mise en œuvre permette une meilleure conciliation des temps de vie et facilite la transition emploi-retraite des salariés, sans pénaliser leur dernier employeur.

Mieux articuler les temps de vie personnelle et professionnelle, comme faciliter la transition emploi-retraite. Voilà, en somme, l’objectif du compte épargne-temps universel (CETU), dont la mise en œuvre faisait partie des promesses de campagne d’Emmanuel Macron, lors des dernières élections présidentielles. Un dispositif dont la CFTC défend actuellement la création, dans le cadre des négociations sur le nouveau pacte de la vie au travail, qui visent prioritairement à favoriser le maintien en emploi des salariés séniors. Ce CETU doit ainsi permettre aux travailleurs de stocker les congés payés qu’ils n’ont pas sollicités, pour pouvoir les utiliser ultérieurement.

Un nouveau droit pour tous les salariés

Cette possibilité de report de congés payés existe déjà dans certaines entreprises, qui ont mis en place un accord de compte épargne-temps, ou CET : « C’est un outil assez semblable au CETU, mais la différence majeure est dans le nom : le CET n’est pas universel, pointe la secrétaire générale adjointe de la CFTC Anne Chatain, qui défend les propositions de la CFTC sur le compte épargne-temps universel, lors des négociations en cours. Le CET ne concerne que 10 à 20% des entreprises du secteur privé et environ 1 salarié sur 5, si on élargit à la fonction publique… Il est surtout mis en œuvre dans des entreprises d’une certaine taille : les TPE-PME n’ont souvent pas l’intérêt ou l’occasion de le mettre en place. Pourtant, elles représentent près de la moitié des salariés et constituent l’essentiel du tissu économique français ».

Aujourd’hui, l’utilisation des droits stockés sur les CET advient majoritairement en fin de carrière : les salariés séniors ayant un CET assez alimenté l’utilisent, par exemple, pour prendre quelques mois, voire 1 à 2 ans de congés payés, avant de pouvoir ensuite toucher leur retraite. Alors que la conciliation des temps de vie fait aujourd’hui figure d’enjeu essentiel pour de nombreux travailleurs, les salariés bénéficiant d’un CET peuvent aussi plus aisément moduler leurs congés, afin que ceux-ci s’adaptent au mieux à leurs besoins personnels et familiaux. « Le CETU viserait donc à généraliser ces solutions et possibilités à toutes les entreprises, résume Anne Chatain, Même en changeant d’entreprise, les salariés pourraient en effet conserver leurs droits aux congés payés non utilisés, pour pouvoir ensuite y recourir, dans le respect des conditions négociées avec leur employeur. « Ca fait 25 ans qu’il n’y a pas eu d’avancée sociale majeure et, de par son universalité, le CETU s’apparenterait à la création d’un nouveau droit, reprend Anne Chatain. Ce n’est quand même pas anodin. »

Agir dans le sens des salariés séniors, sans pénaliser l’employeur

Le CETU pourrait notamment participer à favoriser le maintien en emploi des 50 ans et plus. « Aujourd’hui, les seniors qui arrivent à 62, 63 ans, ont tendance à être licenciés par leur employeurs, car ce sont souvent eux qui ont les plus gros salaires, sont les plus usés, ajoute Eric Courpotin, le secrétaire confédéral CFTC en charge de l’assurance chômage. C’est ensuite l’assurance chômage (en partie financée par des cotisations prélevées sur les salaires des travailleurs) qui prend le relais. » Un surplus de dépenses pour l’UNEDIC, que le CETU pourrait donc participer à réduire significativement. « Car quand on fait valoir son CETU – donc ses congés payés – on reste en activité. », précise Anne Chatain.

Néanmoins, la mise en œuvre du CETU génère des inquiétudes auprès des employeurs. Des préoccupations auxquelles la CFTC a souhaité répondre, en imaginant les modalités de fonctionnement de ce nouvel outil : « La grande crainte des patrons relatifs au CETU, c’est qu’un salarié ait épargné du temps toute sa carrière et que son dernier employeur doive lui payer l’intégralité de ses congés payés », explique Eric Courpotin. Pour parer au problème, la CFTC propose justement un dispositif basé sur un système de mutualisation des CETU : « La proposition que nous portons ne fait précisément pas porter toute la charge sur le dernier employeur, décrypte Anne Chatain. Schématiquement, chaque entreprise communiquera à un organisme tiers paritaire les jours de CETU épargnés par chaque salarié volontaire et abondera en conséquence le CETU des salariés concernés. Quand un salarié prendra des jours de CETU, c’est l’organisme tiers auprès duquel chacun de ses employeurs- présent et précédents – aura payé sa part de congés payés qui financera son absence. »

CETU-CET : deux outils transverses et complémentaires

Reste encore à optimiser l’articulation du CET avec le CETU, le second dispositif n’ayant pas pour but de remplacer le premier, mais de le compléter, de le renforcer et même de globaliser son utilisation. « En fait, là où il existe, le CET ne sera pas remis en question, poursuit Anne Chatain. De la manière dont la CFTC l’a imaginé, le CETU devrait chapeauter tous les CET, servir de toile de fond, pour inciter précisément les entreprises à proposer leur propre CET. » Pour être plus précis, négocier un accord CET devra permettre aux entreprises de spécifier et de borner le périmètre d’utilisation des congés payés stockés sur le CETU. « Par exemple, le CET pourrait acter que les salariés puissent épargner 10 jours maximum par an. Ou encore, qu’il faille avoir minimum un an d’ancienneté pour poser ses congés payés », illustre Eric Courpotin. En superposition du CETU, le CET pourrait donc devenir, pour l’employeur, un mécanisme de régulation du dispositif, afin que ce dernier profite aux salariés, sans pour autant pénaliser l’entreprise où ils officient. « En somme, le filtre du CET permet à l’entreprise de borner le recours à ces congés payés, en imposant des limites préétablies à leur utilisation, conclut Anne Chatain. L’objectif, à terme, ce serait donc qu’une majorité d’entreprises, quelle que soit leur taille, aient un CET. Le CETU, lui, apporte la portabilité des congés, d’un emploi à l’autre, d’une entreprise à l’autre. »

Le CETU mérite une négociation à part entière

Pour la CFTC, l’universalité du CETU doit permettre de renforcer l’attractivité des TPE-PME, notamment celles dont les travailleurs exercent des métiers dits pénibles. « Le CETU offrirait à ces salariés une possibilité de sortie précoce et volontaire du salariat. Le tout, sans pénaliser leur dernier employeur, grâce à la mutualisation de l’outil », résume Anne Chatain. Si la CFTC soutient fermement ce nouveau dispositif, ce dernier doit encore convaincre l’ensemble des partenaires sociaux et notamment les représentants patronaux, qui s’y sont jusqu’ici déclarés opposés. « La CFTC rappelle que, si les partenaires sociaux ne se mettent pas d’accord, l’Etat va prendre la main sur ce dispositif, qui est une promesse de campagne du président de la République» conclut Anne Chatain. Si une mise en œuvre du CETU est écartée à l’issue des échanges en cours, la CFTC demandera ainsi à ce qu’une négociation future lui soit spécifiquement dédiée, dans les mois à venir.


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