Vers une remise en cause des activités sociales et culturelles versées par les comités d’entreprise ?
Le 24 octobre dernier, dans le cadre de l’examen en séance publique du Budget de la Sécu*, l’Assemblée nationale a adopté un amendement visant à modifier les modalités d’attribution des activités sociales et culturelles (ASC). Si le texte voté comprenait effectivement cette mesure, la totalité des aides versées au salarié au titre des ASC ne devrait plus excéder 332 € par an et 664 € pour un salarié avec enfants (au-delà de ces montants le CSE/CE devrait payer des cotisations sociales sur les sommes versées).
L’adoption d’une telle mesure serait une atteinte à la vocation sociale et familiale des ASC dans leur ensemble. Elle se traduirait par une perte de pouvoir d’achat sans précédent pour des millions de salariés et d’agents du public, en particulier pour les salariés avec enfants. De surcroît, elle présenterait un risque de détérioration du dialogue social autour de l’enjeu salarial.
L’Arlésienne…
Depuis plusieurs années en effet, administration et gouvernement n’ont de cesse de déplorer, l’effet de « substitution au salaire » que constituent les ASC. Cette logique est contestable : les ASC sont des prestations qui ne se traduisent pas systématiquement par une dotation financière au bénéficiaire. Elles peuvent prendre la forme d’événement collectifs : arbre de Noël, spectacle, sortie culturelle… Surtout, les ASC correspondent à des montants affectés (solidarité, culture, vacances…), pour répondre aux besoins révélés par le diagnostic social interne, que les représentants des salariés et des employeurs ont tiré de l’entreprise.
Pour autant, s’ils ne constituent pas du salaire, ces avantages représentent un montant financier que les salariés n’ont pas à dépenser eux-mêmes pour accéder à des prestations sociales et culturelles. Pour des millions de salariés, l’impact de l’amendement se traduirait par une perte de pouvoir d’achat de plusieurs centaines d’euros par an, en particulier pour :
- Les salariés avec 2 enfants ou plus ;
- Les salariés les plus modestes, qui ont plus recours à l’appui du CE (solidarité et vacances notamment).
Un climat social tendu autour de l’enjeu salarial
Cette perte sèche risque de se traduire par une revendication de compensation directement sur les salaires, dès les négociations obligatoires de l’année suivante. Cette situation dégradera le climat social des entreprises, car les employeurs ne sont pas en capacité de compenser en salaires, par définition assujettis à cotisations, la totalité des montants perdus en ASC, qui eux sont exonérés.
Une concertation indispensable
Il ne semble donc pas raisonnable d’adopter une mesure portant en elle de telles conséquences sans concerter auparavant l’ensemble des parties prenantes au débat. L’écosystème des CE est large :
- CE de toutes tailles et leurs équivalents publics
- Partenaires sociaux
- Fournisseurs de services aux CE (émetteurs de titres cadeau/culture, Ancv, prestataires conseils)
- Secteurs économiques concernés : tourisme/voyage, culture, loisirs et sport principalement
Sans nécessairement appeler au statu quo et reconnaissant l’utilité d’une sécurisation juridique des pratiques actuelles, la CFTC demande qu’une concertation soit menée en se donnant les moyens d’une expertise préalable.
*PLFSS 2019 (projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019)
Au lieu de réformer dans la précipitation le dispositif, la CFTC demande que le Gouvernement remette au Parlement, courant 2019, un rapport établissant des scénarii de réforme de ces avantages et évaluant les diverses conséquences pour les finances sociales. Ce rapport serait établi en concertation avec toutes les parties prenantes, en particulier les salariés, les employeurs et les secteurs économiques concernés.